reforme fiscale pour reduire ecart flagrant entre heritiers et partis de rien

Un appel à la réforme fiscale face à la montée en puissance des inégalités patrimoniales

Dans la France d’aujourd’hui, l’écart se creuse de manière alarmante entre ceux qui héritent et ceux qui partent de rien, et les chiffres parlent d’eux-mêmes : 60 % des patrimoines proviennent aujourd’hui de l’héritage, contre seulement 35 % au début des années 1970. Face à cette réalité qui menace le tissu social et l’équité économique, Guillaume Allègre, dans une tribune incisive au « Monde », met en lumière le danger latent de cette disproportion. Sa solution ? Une réforme fiscale profonde qui envisagerait la taxation des patrimoines non seulement sur les revenus actifs qu’ils génèrent, mais aussi sur leur potentiel latent. Décryptage !

tribune de guillaume allegre chercheur sciences po dans le journal lemonde

Virage fiscal sous Macron, entre promesses et réalités

Lorsqu’Emmanuel Macron esquissait ses ambitions présidentielles en 2016, il prônait un coup de barre fiscal en faveur de l’audace économique, préférant le dynamisme de l’« outsider » démuni face à l’« insider » conforté par son héritage. Sa promesse ? Réorienter la fiscalité pour taxer davantage la rente que le risque, en mettant en avant la taxation sur les successions plutôt que l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF). Pourtant, si l’ISF sur le patrimoine mobilier a été rayé de la carte durant son mandat, les droits de succession, eux, n’ont connu aucune réforme significative. Plus surprenant encore, le président propose aujourd’hui une réduction de ces mêmes droits, en dépit de leur impopularité marquée. Il semblerait que l’équation fiscale de Macron tende à alléger les prélèvements sur les revenus du patrimoine, laissant perplexe quant à l’existence de ce qu’il considérerait désormais comme des « mauvais impôts ». Cette stratégie interpelle : quelles seront les répercussions pour l’équilibre social et l’encouragement de l’initiative individuelle dans l’économie française?

Exemptions fiscales : le double jeu gouvernemental

Le gouvernement clame haut et fort son opposition aux rentes, mais dans le même souffle, propose de les défiscaliser. Un paradoxe ? Assurément. Certes, tout le monde devrait avoir un patrimoine, comme l’explique le directeur de Finzzle. Mais n’en déplaise à certains, posséder un patrimoine, c’est ni plus ni moins bénéficier d’une rente : on détient un droit sur des revenus futurs, sans que cela nécessite un travail en retour. Pour les particuliers, ces rentes proviennent souvent de l’épargne accumulée, tandis que pour les entreprises, elles sont le fruit de l’innovation. Prenons Apple ou Facebook : leur valorisation boursière stratosphérique ne repose pas seulement sur l’innovation, mais aussi sur des effets de réseau et des acquisitions stratégiques de concurrents.

le patrimoine pour tous est-ce une utopie

Par ailleurs, la frontière est souvent floue entre le mérite personnel et la part de chance, ou encore l’exploitation du travail d’autrui. Imaginons un propriétaire qui a acheté un appartement à Paris grâce à ses économies, mais qui a aussi profité de l’explosion des prix de l’immobilier. Cet appartement, solidement ancré en France, bénéficie d’une exonération de plus-values en tant que résidence principale, sans parler des abattements fiscaux lors d’une succession. Le patrimoine se retrouve ainsi au cœur de deux visions apparemment contradictoires : d’un côté, la peur du nomadisme fiscal, de l’autre, un attachement profond à la propriété et à la transmission familiale. On ne peut pas, d’un côté, encourager le patrimoine mobile et, de l’autre, prétendre combattre les rentes.

Enfin, il est bon de rappeler que le capital ne produit pas toujours des revenus et que, selon le Conseil constitutionnel, il serait confiscatoire d’exiger des contribuables qu’ils réduisent leur patrimoine pour échapper à l’impôt.